Zabriskie Point "Tout est bien" - 1996
"Contre culture"
A vous regarder
on aurait pu croire
on aurait pu croire
à vous regarder
que vous étiez
embarqués, décidés, engagés.
Mais vous vous plaisez dans les postures
de la critique enragée
z'avez vos codes, vos cafés, port de docs exigé.
Car vous avez abandonné
oui vous avez abandonné.
A te regarder on aurait pu croire
on aurait pu croire à te regarder
que tu étais embarqué, décidé,
comme on dit engagé.
Mais t'as connu les joies de la
contre-culture et tu t'y tiens
c'est ta fonction ta nature
tu l'échangerais pour rien.
Car tu as abandonné
tu veux que j'te dise abandonné.
A vous regarder on aurait pu croire
on aurait pu croire à te regarder
que vous étiez embarqués, décidés, engagés.
A vous croiser dans la rue on aurait pu
se faire des idées sur vos idées
sur votre capacité à échapper aux clichés.
Vous êtes la norme inversée
la haine institutionnalisée
signe distinctif rebelle
sur vos cartes d'identité.
Car vous avez abandonné
pourquoi avez-vous abandonné
pourquoi m'avez-vous abandonné?
"En attendant mieux"
J'ai vécu toute ma vie en attendant mieux
coulé jeunes et vieux jours en attendant mieux
j'ai supporté d'être battu
en attendant d'être pansé
en attendant d'avoir vécu
j'ai supporté d'être de végéter
célibataire option pêcheur
j'ai attendu le gros poisson
personne n'a voulu faire l'âme sœur
personne n'a mordu à l'hameçon.
En attendant mieux
Syndiquer menu menu pour obtenir mieux
une taxe en moins un franc de plus, mieux
j'ai vendu des litres de sueur
en rêvant d'une augmentation
et quand j'me suis r'trouvé chômeur
j'ai rêvé de rémunération
j'ai supporté d'être locataire
en attendant d'être propriétaire
j'ai supporté d'être moins que rien
en attendant d'être quelqu'un.
En attendant mieux
Toujours tuer le temps,
à imaginer mieux
et se retrouver mourant
sans avoir eu mieux
j'ai vécu toute ma vie
en attendant couché dans mon pieu
un je ne sais quoi,
une je ne sais qui
une fille, un chien
une mouche, un dieu.
Maintenant je suis vieux
Maintenant je vois bien
comment le mieux
est l'ennemi du bien.
"Golden eighties"
1983,
Couilles en acier bite en bois
tu ne jurais que par les lois du marché et t'as gagné
mais à trop jouer avec les lois on fini par marcher
dans les combines
1987,
Ouais tu t'obstines tu t'endettes
et déjà tu regrettes de ne pas avoir vécu
une vie honnête
t'as voulu jouer au jeu de l'oie du marché
et t'as perdu
T'as voulu tout jouer sur des coups de dès
et t'as perdu
"L'âge des possibles/en vérité"
Tous ces jeunes gens en étaient à la fin du repas
on avait parlé de la bouffe, de la guerre, et du chat
quand Claude a fait entendre une voix mélancolique
racontant qu'elle avait retrouvé une vieille boîte à musique
et alors elle s'est mise à chanter
Angélique elle s'est mise à chanter :
"Ou sont tous nos espoirs passés?"
Alors on s'est souvenu la naïveté de l'enfance
les utopies, les folies de l'adolescence
on s'est souvenu Goldorak et Casimir
on s'est écrié "pourquoi pas tout plaquer et partir?"
et alors ils ont tous entonné
tous ensemble tous en chœur entonné :
"Ou sont tous nos espoirs passés?"
une chanson c'est tellement bien
ça vous parle de douleur pour le temps d'un refrain
C'est à ce moment là que j'suis arrivé
comme quand dans une chanson tout commence à speeder
comme j'avais vu faire au ciné
Eastwood en bout d'table, impitoyer
j'ai dit : "en vérité je vous le dis,
vous êtes de ceux qui disent qui y ont cru
mais qu'ils n'y croient plus
En vérité je vous le dis, vous n'y avez jamais cru
voulez que j'vous dise où sont vos espoirs passés?
Dans vos caleçons, dans vos bibelots, dans vos métiers
espoirs passés laissez-moi rire
tout plaquer arrêter donc de vous mentir
en vérité vous avez toujours été de l'autre côté
en vérité je vous le dis toujours du bon côté
en vérité vous n'avez jamais espéré.
"Lose is win"
Tout le monde voudrait endormir mes grands maux
et ne cesser de me prescrire des somnifères sociaux
on voudrait m'inoculer la santé en douceur
me socio-démocratiser dans la bonne humeur
mais j'ai recraché les gélules de la charité
jamais avalé la pillule des congés payés
un jour maman m'a dit "mon loup, va chez le médecin"
mais j'ai trouvé le petit livre rouge en chemin.
Je refuse de céder à la guérison
d'être assisté dans ma respiration
j'aurais vraiment l'impression
de monnayer ma subversion
si jamais j'accédais à la satisfaction.
Alcoolomane téléphonez à SOS coma
panne de cul consulter radio founa
crise économique : voilà pour vous indemnités
sentimentale : voilà des mouchoirs pour mieux pleurer.
Eduquez vos enfants sans heurts avec "Parents"
avec "Biba" évitez les douleurs de l'accouchement
bientôt nous auront vaincu la laideur et l'enfer
la mort aura vécu, relégué six pieds sous terre.
Je refuse de céder à la guérison
d'être assisté dans ma respiration
j'aurais vraiment l'impression
de monnayer ma subversion
si jamais j'accédais à la satisfaction.
Je ne suis pas de ces rappeurs qui demandent comme un dû;
des jolies cages d'ascenseur et des bons pour la Sécu
au contraire je dis "laissez-moi crever"
vous me verrez bientôt méchamment ressuscité
je thésaurise mes souffrances pour mieux exploser
je recule (les échéances) pour mieux (tout faire) sauter
malade je suis, malade je reste
insatisfait de moi et de tout le reste.
Je refuse de céder à la guérison
d'être assisté dans ma respiration
j'aurais vraiment l'impression
de monnayer ma subversion
si jamais j'accédais à la satisfaction.
"Tout l'bordel et plus encore"
Compilation de titres des
Ramones.
_Let me tell you'bout
All the stuff and more
Or tell me something'bout
All the stuff and more...
"Amélie"
Un soir de rien on se retourne derrière soi
et derrière soi il faut voir ce qu'on y voit
du désert, à peine un animal parfois
c'est juste de la mort qu'on a laissé derrière soi.
Pourtant, c'qu'on était bien parti
on avait tout le temps et de beaux habits
on avait du talent aussi.
Alors on se demande comment on en est arrivé là
comment peu à peu on c'est perdu en route
comment tout c'est dégradé, et pourquoi
pourquoi tout le monde au fond a voulu nos déroutes.
Il faudrait savoir comment un soir de rien
on se retrouve partant dans un train.
Tout ce qu'on a fait, tout ce qu'on a dit
par le ressentiment à néant réduit
tout ce qu'on a tenté et pourtant c'est comme si
comme si en fantôme j'avais traversé ma vie
Pourtant c'que j'étais bien parti
Au-dessus des rails les gens se penchent
un type s'est jeté mais ce n'est pas moi
Moi je préfère rester encore un peu
et apprendre enfin à regarder tes yeux.
Au-dessus des rails les gens se penchent
un type s'est jeté mais ce n'est pas moi.
"Où sont les cons?"
-Eh t'as pas vu hier au soir à la télé,
toute cette violence quel voyeurisme
cette petite fille violée sur le chemin de l'école
je l'ai vu six fois c'est un peu trop je crois.
-Mais moi tu vois je ne l'ai pas regardée
mais ça ne m'inquiète pas
car je vois que tu t'es consacré à le faire pour moi.
-Mais t'as vu maintenant à la télé,
y a plus qu'du cul, d'la décadence
y en à 20h30, à 22h00, à 23h00
quand je vais me coucher je suis secoué.
-Mais moi tu sais je n'ai pas la télé
j'l'ai vendu en 29
avec l'argent j'ai acheté
un dictionnaire tout neuf.
OU SONT LES CONS?
Mais t'as pas vu tous ces jeux à la télé
et tout ces shows de la réalité
et tout ces cons qui les regardent
si on en faisait une armée
que de conquêtes; la patrie retrouvée.
Mais à ce que je vois tu as tout regardé
il faut y croire au fond
que tu te pose en unité de ton armé de cons
mais à ce que je vois tu as tout regardé
et j'en déduis qu'au fond
tu n'es jamais qu'une unité de ton armée de cons.
-Mais où sont les cons?
s'ils sont partout les cons
dis-moi c'est qui les cons?
si tout le monde est con?
-Moi les cons je n'y crois pas
je n'y ai jamais cru
moi je ne crois qu'en la loi
mais la loi nous a eus
OU SONT LES CONS?
"Marx et Hegel"
-On sirotait une bière en silence entre homme toi et moi
puis t'as parlé et tout c'est cassé entre toi et moi.
T'as dit "à l'aube du troisième millénaire
on devrait pas voir ça;
tous ces SDF sans domicile fixe
on devrait pas voir ça".
T'avais déjà dit des conneries
des conneries t'en avait déjà dit
des conneries
mais là t'as fait très fort.
-A la terrasse en silence
on contemplait la beauté de l'été
et puis tu as parlé et l'harmonie
du jour s'est déchirée.
T'as dit "dans le pays des droits de l'homme
on devrait plus voir ça tous ces chômeurs
sans travail on devrait plus voir ça."
T'avais déjà dit des conneries
des conneries t'en avait déjà dit
des conneries
mais là t'as fait très fort.
-Dans les ruines de l'harmonie du jour
je n'avais plus rien à perdre
dans les rots de la bière sirotée avec amour
je n'avais plus qu'a te dire merde
j'ai dit : "dans un pays à 3 millions
de chômeurs on devrait plus dire ça
dire que ce pays est le pays des
droits de l'homme on devrait plus".
J'avais déjà eu du génie
du génie j'en avais toujours eu
mais là j'ai fait très fort.
"J'ai tué un chien"
Moi j'vous dis la catastrophe
j'l'ai vue venir de loin
on s'rapproche et plus on est proche
et plus on est loin
quand elle a voulu tapisser
j'aurais du réagir
mais j'me suis retrouvé emmeublé
canapé-lit, fauteuils en cuir.
Arrive un temps arrive un temps
chenille écœurée du cocon
on a envie de s'barrer.
Toujours plus loin dans l'horreur
elle a voulu un chien
moi du coup, fougue et stupeur :
"pendant qu'on y est
pourquoi pas un gamin?!"
elle me dit que justement
c'est déjà en train
moi j'lui dis "l'avortement
c'est des chômeurs en moins!"
Arrive un temps
on a plus vingt ans
et on se demande c'qui vaudrait mieux,
ou la tuer, ou se barrer.
Putain de sale histoire
sans queue ni tête
comme le chien que j'ai tué un soir
à coup de machette.
C'est qu'un temps est arrivé
c'était plus le temps de philosopher
fallait la tuer elle ou le chien...
J'ai tué un chien
fallait que je tue quelqu'un
mais pour tuer je vaux rien
alors j'ai tué un chien
c'est toujours mieux que rien
j'ai tué un chien
"Logique du pire"
J'suis p'têt du genre malin mais j'me sent méchamment
plus intelligent quand je pense le pire
le désordre du monde m'inspire une tendresse amusée
au moins le malheur y est d'une criante sincérité.
Rien ne me manque désirer rien je suis comblé
pour moi donc j'aime la vie je suis un ogre de pitié
une chance sur un milliard je veux ce hasard
la pire des réalités alimente ma joie d'exister.
Notre vie c'est l'atrocité, la guerre, la maladie
d'ailleurs même le moi est haïssable comme disait l'autre
mais toi tu cherches un bonheur?
dis-moi lequel,
tu réponds rien
tu te connais t'y penses parfois,
tu n'as besoin de rien.
Rien ne me manque désirer rien je suis comblé
pour moi donc j'aime la vie je suis un ogre de pitié
une chance sur un milliard je veux ce hasard
la pire des réalités alimente ma joie d'exister.
J'suis p'têt du genre malin mais j'me sent méchamment
plus intelligent quand je pense le pire
le désordre du monde m'inspire une tendresse amusée
au moins le malheur y est d'une criante sincérité.
Notre vie c'est l'atrocité, la guerre, la maladie
d'ailleurs même le moi est haïssable comme disait l'autre
mais toi tu cherches un bonheur?
dis-moi lequel,
tu réponds rien
tu te connais t'y penses parfois,
tu n'as besoin de rien.
Rien ne me manque désirer rien je suis comblé
pour moi donc j'aime la vie je suis un ogre de pitié
une chance sur un milliard je veux ce hasard
la pire des réalités alimente ma joie d'exister.
c'est la vie telle qu'on le soupire
quand les faits n'ont plus rien à dire
tragique et silence, on devrait s'arrêter ici.
"Menace mineure"
J'fait pas Zorro comme il faudrait
j'arrive jamais quand il faudrait
toujours zéro, toujours tricard
toujours trop tôt, toujours trop tard
héritier déchu véhiculeur de futur ringards
J'étais pas là quand à Moscou
tout a commencé à merder
j'étais pas là quand Drucker est né
j'ai rien capté quand t'as
commencé à vieillir
à faiblir à trahir
au bout du compte je ne suis
qu'une menace mineure
We're just a minor threat
j'suis jamais là où ça s'décide
j'suis jamais là où ça s'passe
téléspectateur provincial
j'voudrait bien pénétrer
mais j'ai pas d'passes
dans les bureaux de direction
de multinationales
moi je n'ai pas changé
c'est le monde qui a changé
de trottoir quand il m'a rencontré
et depuis j'parle tout seul
personne m'écoute
tout l'monde s'en fout
tout l'monde s'écoute
tout l'monde se fout de moi.
"Tout est bien"
Le ciel est beau le soleil brille
et c'est bientôt Noël
je vis dans un pays civilisé
tout est bien en somme
et la vie vaut la peine d'être vécue
y a des gens qui s'aiment
tout est bien en somme.
Mais j'ai perdu le sens
j'ai perdu les fins
j'ai épuisé mes sens
j'ai assouvi ma faim
et je ne suis plus si jeune
non je ne suis plus si
la sea le sex le sun
s'ébattent hors de ma vie
Que faire? Vladimir
Dis-moi du haut de ta statue
déboulonnée
si tu ne me réponds rien
il ne me restera plus qu'à prier
ou la corde ou le gaz
Maryvonne est amoureuse
mais Maryvonne je n'en veut pas
moi je n'aime que les danseuses
et le jeu trouble de leurs pas
Marie-Paule joue ce jeu
mais Marie-Paule n'est pas pour moi
elle embrase sous d'autres cieux
d'inaccessibles feu de joie.
Moi la joie m'a délaissée
un soir d'émeute à Berlin
plus de mur pour m'appuyer
et Cuba était bien loin
et Cuba est encore loin
il faudrait encore ramer
existe t'elle au moins
où l'ai-je seulement rêvée?
Que faire? Vladimir
Dis-moi du haut de ta statue
déboulonnée.
Que faire? Vladimir
si tu ne me réponds rien
il ne me restera plus qu'à prier
ou la corde ou le gaz
prier?
je ne sais plus je n'ai jamais su prier
je suis d'une génération
qui ne jamais ne prie
nous sommes tout juste bons au cri
alors crier.